Mon premier rendez-vous avec une thérapeute date de 1993, je voulais que ce soit une femme. Elle exerçait en tant que psychologue. Je me souviens très bien de cette personne qui s’est présentée à moi dans une posture froide et rigide genre « droit dans ses bottes ». J’étais très intimidée et gênée. Au fur et à mesure de nos rendez-vous, je me sentais de plus en plus mal ; la honte, la culpabilité m’envahissaient jusqu’à réduire à néant toute espérance de mieux être. Pour qui me prenais-je pour vouloir chercher à comprendre ? Le comble de mon mal-être (je le raconte dans mon livre « J’irai danser sur l’arc-en-ciel« ), vient de cette phrase qui m’a hantée pendant des années : L’inceste c’est le fantasme de toutes les petites-filles. La honte avait atteint toutes les cellules de mon corps. Elle me rongeait.
Cette femme faisait partie de ces thérapeutes drapés dans leur toute puissance. C’était avant. De tels thérapeutes aujourd’hui ne devraient plus exister. Dans le domaine de la santé (comme certainement dans d’autres domaines), plus on avance moins on sait ! Cependant il y a une chose que nous partageons tous : nous détenons un morceau de la vérité. Et c’est ensemble que nous pouvons avancer et guérir.
Le thérapeute d’aujourd’hui n’a pas la solution au problème. Non pas qu’il soit devenu ignorant, mais le contexte n’est plus le même. L’ancien monde basé sur la toute puissance d’une autorité sachante se désagrège : les pyramides s’écroulent. Avec le nouveau paradigme, les anciennes structures s’effondrent : l’autorité du titre a perdu toute crédibilité. Aujourd’hui il nous faut repenser l’entraide, le collectif. Pas pour des questions morales ou autres, mais tout simplement parce que c’est la seule solution pour que la vie demeure et prospère.
Le corps a des ressources incroyables et insoupçonnées ! Rien que par le pouvoir de l’intention et de la pensée, nous pouvons changer complètement notre perception du monde et de ce que nous vivons. Alors quand un patient consulte un thérapeute, c’est ensemble qu’ils vont avancer sur le chemin. Chacun apprend de l’autre, chacun grandit avec l’autre, chacun se nourrit de l’expérience de l’autre.
Aujourd’hui, c’est en montrant son humanité et donc sa fragilité, qu’un thérapeute peut aider son patient. Celui-ci s’autorise alors à exprimer sa vérité, sa singularité. Cheminer vers soi peut être douloureux car comme disait Albert Camus « Pour pouvoir se connaître, il faut d’abord s’accepter ». C’est sans doute le travail de toute une vie ! Le thérapeute d’aujourd’hui doit être formé à cette belle ouverture d’écoute et de coeur. Il a fait un travail sur lui, il continue d’avancer et de progresser sur son propre chemin. Et s’il est traversé par des émotions lors de consultation, il sait discerner ce qui lui appartient ou pas.