Je l’aime bien G. Il est toujours souriant quand il arrive, jamais ponctuel mais bon… j’accorde des circonstances atténuantes aux migrants. Ils ont d’autres chats à fouetter que d’arriver à l’heure au cours de français. Le cours se termine. Je lui demande ce qu’il pense de la situation politique en Tunisie, son pays natal. Je le questionne sur la liberté compte tenu de la dernière arrestation de journalistes et d’une avocate. Il me chante les louanges de la politique migratoire du Président : « trop d’africains arrivent en Tunisie ! Trop c’est trop ! Il faut de l’ordre ». B, une migrante tente d’expliquer que les africains veulent passer par la Tunisie pour arriver en Italie, puis continuer…
Mes élèves sont partis, je rentre à pied sous le faible soleil du jour. J’aperçois G plus loin sur le trottoir. Il s’arrête pour mettre ses oreillettes. Je le double, il ne me voit pas. Je repense à son propos. Il critique les migrants et lui : qui est-il ? Que fait-il ici ? Tout en rentrant chez moi, je me dis que notre nature humaine est bien misérable. Nous critiquons toujours l’autre avant de regarder nos propres actes. L’autre est toujours plus misérable, plus pollueur, plus bruyant, plus alcoolique, plus pervers et j’en passe, que moi !